Le marché d'art numérique : en émergence

par Adina Dabija

 

 

L'art numérique cherche encore son identité et son public. Le marché d'art électronique reste encore émergent. La principale caractéristique de ce marché sera sans doute l'absence des intermédiaires: les artistes numériques n'auront pas besoin de médiateurs.

L'intérêt des centres d'art contemporaines en l'art numérique commence à partir des années 1990. Musées comme San Francisco Museum of Modern Art de New York organisent systématiquement des expositions sur ce nouveau type d'art. À Paris est inauguré, en 2001, le Palais Tokyo, dédié exclusivement aux arts numériques. Des grands instituts spécialisés en art électronique voient le jour partout au monde, autant dans les pays les développés comme France (CICV), Japon (InterCommunications), Allemagne (Zentrum für Kunst une Medientechnologie), Espagne (Media Centre of Art and Design) etc., que dans les pays du ex - bloque communiste - Macédoine (Centre d'Art Contemporaine de Skopje), Hongrie (C3), Bulgarie (Studio Computer Art Society). Les festivals d'art numérique se multiplient.

L'investissement dans l'art électronique est le plus souvent de nature publique : l'espace public, lieu de débat, devient le territoire d'expérimentation artistique par la mise en œuvre de dispositifs scéniques modulables, particulièrement adaptés aux performances théâtrales, chorégraphiques, musicales et multimédia. Les artistes d'expressions traditionnelles (chanteurs, écrivains, hommes de théâtre etc.) adoptent les nouveaux expressions multimédia dans leurs spectacles et présentations. L'art électronique devient l'emblème de la modernité, du vivre ensemble dans la cité.

Le site Internet comme lieu d'ancrage des œuvres devient le portfolio et la carte de visite de l'artiste en recherche des contrats et de financements. Il ne peut pas ne pas en avoir un. La source principale des revenus des artistes numériques est le design électronique. C'est rare qu'ils vendent des œuvres en tant que tel, mais les exceptions existent. Le cas de Fred Forest, le premier artiste ayant vendu une œuvre internaute pour la somme de 58.000 Francs ($12.000) est mémorable. L'œuvre, mise en vente et présentée à la Foire Internationale d'Art Contemporain de Paris du 2 au 7 Octobre 1996 et a été venu le 16 octobre à l'Hôtel Drouot.

Pour l'économiste américain Jeremy Rifkin, les secteurs les plus innovants de l'expérimentation artistique électronique constituent les laboratoires avancés du nouveau capitalisme culturel, qui mène vers une sorte d'hyperindustrialisation de la culture.

L'art électronique bouleverse les programmes artistiques scolaires et l'organisation des espaces muséals. Les écoles d'art sont obligés non seulement de restructurer leurs programmes pédagogiques, mais aussi de réorganiser leurs espaces de travail et d'exposition. Les institutions muséals offrent la possibilité de l'accessibilité à distance leurs banques de données - le musée virtuel. Son objectif est d'accrocher le public et de l'amener visiter le musée sur place. Les applications de simulation de déplacement dans un espace muséal sont encore l'apanage de grosses institutions qui offrent un terrain de choix pour tester et valoriser leurs exploits techniques, comme IMB. Il ne faut pas sous-estimer ce qu'implique la mise à disposition de telles ressources en ligne : les coûts de traitement de l'information très importants. Par exemple, la base de données Info-Muse (SMQ) de la Société des musées québécois compte maintenant environ 180 000 images et plus de 600 000 notices sur des oeuvres ou des objets collectionnés. Déjà largement utilisée par les muséologues, la banque d'informatique sera bientôt partiellement mise à la disposition des internautes. La SMQ entend dévoiler ce volet de son site grand public en mai 2003, lors de la prochaine Journée internationale des musées.

La capacité d'action, de diffusion et de communication offerte par l'Internet donne à l'artiste des possibilités économiques équivalentes à celles d'un musée ou d'un centre de recherche. Cette situation tout à fait inédite aura sans nul doute une influence déterminante sur les conditions sociales de la culture et sur ses productions dans le futur.


 

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